Que faire ?

Le « dialogue » convoqué au pas de charge le lundi 26 février 2024 à Diamniado par le Président Macky Sall a été un retentissant flop comme le titrait le lendemain votre quotidien préféré Yoor Yoor. Mis à part les représentants des cultes religieux, le chef de l’État n’était entouré que des siens. La quasi-totalité des 19 candidats à l’élection présidentielle a brillé par son absence. Seuls deux d’entre eux sur les 19 ont daigné faire le déplacement. Idrissa Seck qui était annoncé comme potentiel participant a fait faux bond et a signifié par un communiqué que son absence procédait d’un refus de « … cautionner un éventuel coup d’État constitutionnel savamment orchestré par un président en fin de règne… ».

Monsieur Seck n’est pas un extrémiste, encore moins un opposant radical, car jusqu’à ce refus, on pouvait légitimement le classer parmi les alliés de Macky Sall. Parmi les alliés du Président qui étaient au Centre international de conférence de Diamniadio, il s’en est trouvé plusieurs, pour lui dire tout le mal qu’ils pensaient des intentions qui motivent son humeur « dialogueuse » : refuser d’appliquer les décisions du Conseil constitutionnel afin de se maintenir au pouvoir. Ces estocades ajoutées aux rappels du représentant culte catholique sur la nécessité de « respecter les institutions » et de « poursuivre le processus électoral » interrompu par la décision du 3 février 2024 ne semblent pas émouvoir le locataire du Palais de l’avenue Léopold Sédar Senghor. Il tient à son coup d’État et ce ne sont pas les paroles empreintes de sagesse du représentant du Cadre Unitaire de développement de l’Islam au Sénégal (CUDIS) qui vont lui faire changer d’idée.

Les choses sont claires. Les intentions du chef de l’État sont lisibles pour qui s’en donne la peine. Il ne fait rien pour les cacher. Il veut rester au pouvoir, et ceci pour très longtemps voire pour le restant de sa vie. Ses déclarations sur la fin de sa « mission » le 2 avril sont très rapidement suivies si ce n’est dans la même phrase de conditions qui rendent rédhibitoire la concrétisation de son départ. Il use de manœuvres dilatoires, fait miroiter des libérations d’otages politiques, met en projet une loi d’amnistie pour serrer les rangs dans son camp et s’assurer la loyauté de certains éléments des forces de l’ordre. Pour rester, il fait semblant de partir. La preuve est cette confidence faite à Jeune Afrique par un ministre en activité. En novembre 2023, à son grand étonnement un de ses collègues lui avait dit en marge d’un Conseil des ministres : « il n’y aura pas d’élection présidentielle en février 2024… l’objectif est de gagner deux ans… »

Les intentions du président Sall ne vont pas fatalement se réaliser. Ousmane Sonko et le Pastef dans un passé récent ont mis en échec sa volonté de se présenter à un troisième mandat. Ils ont réussi grâce à leur abnégation, leur courage et leur vision stratégique. Le prix a été élevé pour eux puisque les principaux cadres dirigeants sont aujourd’hui dans les liens de la détention. Ce combat doit être poursuivi pour mettre en échec le coup d’État rampant. Il doit être mené avec discernement. En distinguant le principal du secondaire. Le projet de loi d’amnistie doit être dénoncé, mais sans perdre de vue que même adopté et promulgué, il peut être détricoté par une nouvelle loi dès les premiers jours de la fin du mandat de Macky Sall. Le temps qui s’écoule rend de plus en plus difficile une solution exclusivement juridique et s’inscrivant dans l’ordre constitutionnel. Pour contrer le coup d’État, il faut impliquer le peuple. En définitive, c’est à lui qu’appartient la souveraineté. Les comités populaires de défense de la République et de restauration de la démocratie composés des forces politiques, des travailleuses et travailleurs, les associations de femmes, les mouvements de jeunes doivent voir le jour sur tout le territoire national. Elles doivent pour tâche principale la défense de tous les contrepouvoirs au président Macky Sall. Elles doivent exercer une pression positive sur le Conseil Constitutionnel pour qu’il prenne ses responsabilités et organise le scrutin présidentiel avant le 2 avril 2024. Il est de leur devoir de rappeler au Président Macky Sall que le 2 avril 2024, quelle que soit l’évolution du processus électoral enclenché par le Conseil Constitutionnel, son mandat à la tête du Sénégal prend fin.  À défaut d’unité organisationnelle des mouvements de lutte contre l’attaque de la République par le pouvoir nous devons travailler à l’unité d’action.

 KU BËREY DAAN !

Auteur : Félix Atchadé

Je suis médecin, spécialiste de Santé Publique et d’Éthique Médicale. Je travaille sur les questions d’équité et de justice sociale dans les systèmes de santé. Militant politique, je participe à l'oeuvre de refondation de la gauche sénégalaise.

Une réflexion sur « Que faire ? »

  1.  Bonjour Felix. Bel article. Coûrt et synthétique. Sauf qu’il reste à savoir comment créer et rendre actifs ces comités de de défense de la république . Salut fraternel

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