
La révolution n’est pas un banquet de privilégiés : c’est le soulèvement de ceux qu’on croyait dociles. Et le Sénégal en a donné une éclatante démonstration le 24 mars 2024. En une journée, le pays a fait mentir les fatalistes et surpris les cyniques. Ce jour-là, un peuple que l’on disait résigné s’est levé, a brisé les chaînes de la reproduction politique, et ouvert une brèche dans l’ordre postcolonial. Bien sûr, certains, du haut de leurs tribunes éditoriales, s’empressent d’y voir le chaos, l’improvisation, voire la vengeance. À les lire, le pays aurait sombré dans une aventure périlleuse. Il faut au contraire y voir ce qu’il est réellement : le point d’émergence d’un nouveau cycle historique, une réinvention du politique par le bas, un souffle populaire qui cherche sa traduction institutionnelle.
Contre-révolution et sabotage : la réaction s’organise
Mais ce processus révolutionnaire fait désormais face à une offensive organisée de la réaction. Une contre-offensive menée sur plusieurs fronts : dans les médias d’abord, où une propagande fébrile orchestre des attaques malveillantes, souvent coordonnées, contre Ousmane Sonko. Au-delà de sa personne, c’est la révolution démocratique elle-même qui est visée, son élan populaire, son imaginaire subversif. Cette stratégie médiatique s’accompagne d’un autre front, plus insidieux encore : celui de la contre-révolution administrative. Une fraction de l’appareil d’État, fidèle aux intérêts de la bourgeoisie politico-bureaucratique, multiplie sabotages, inerties, et actes de zèle, menaçant de disloquer le lien de confiance entre le nouveau pouvoir et le peuple.
La tactique de la réaction est claire : caricaturer le discours de rupture, le tourner en dérision, retourner contre lui sa propre promesse. Mais les réponses ne peuvent être timides. Le seul rempart réel à cette offensive, ce sont les réformes structurelles. Il faut non seulement gouverner autrement, mais révolutionner l’administration, mettre au pas les franges les plus réactionnaires de la haute fonction publique, reconquérir les leviers d’exécution, et aligner la machine d’État sur la volonté populaire.
En cela, le Président Bassirou Diomaye Faye incarne une sobriété lucide, une manière d’exercer le pouvoir sans fracas, mais avec une boussole ferme. À ses côtés, le Premier ministre Ousmane Sonko agit comme un aiguillon idéologique, un agitateur de conscience, un réformateur sans concession. Leur alliance n’est pas seulement politique : elle est stratégique, historique, complémentaire. Elle assume la dialectique du changement : patience et radicalité, réforme et rupture.
Le rôle du PASTEF et de l’hégémonie culturelle
Mais un tel moment historique exige un outil politique à la hauteur : le Parti. Le PASTEF ne peut rester en retrait. Il doit se transformer en véritable avant-garde de la révolution, capable de faire vivre l’esprit du 24 mars 2024 dans les institutions, les quartiers, les syndicats, les villages, les administrations. Il doit devenir le levier de la politisation populaire, le relais de la volonté de changement, le gardien de l’élan révolutionnaire.
Enfin, cette révolution ne triomphera que si elle gagne la bataille de l’imaginaire. Cela suppose de construire une hégémonie culturelle, au sens gramscien du terme : créer des médias libres, relier la pensée critique à la culture populaire, mobiliser la musique, le théâtre, le cinéma, les langues nationales comme autant de vecteurs d’émancipation. Le discours de la rupture systémique doit infuser partout : dans les récits, les images, les mots, les gestes quotidiens.
C’est ainsi, et ainsi seulement que le Sénégal pourra transformer la brèche du 24 mars 2024 en véritable passage. Ce que nous vivons n’est pas une parenthèse. C’est un commencement.
