Même mensonge, nouvelle impasse : Israël contre l’Iran

Je ne suis ni Iranien ni proche de la théocratie de ce pays. Je suis panafricaniste et internationaliste, et j’écris depuis une position que d’aucuns continuent de considérer comme marginale dans les débats mondiaux — à tort. Mais c’est peut-être cette position de « bord du monde » qui m’oblige à regarder lucidement ce qui s’y joue. Car les guerres qui commencent là-bas finissent toujours par frapper ici : nos ports, nos prix, nos peuples. Quand Israël bombarde Gaza ou attaque l’Iran, ce ne sont pas seulement des munitions qui traversent le ciel du Moyen-Orient, ce sont aussi nos équilibres économiques, notre stabilité diplomatique, notre rapport au droit international qui vacillent. Rester silencieux serait se rendre complice.

En tant que citoyen du monde je crois que nous devons refuser que l’usage de la force, l’élimination ciblée, et le droit du plus fort soient normalisés. Ce qui se joue entre Tel-Aviv et Téhéran dépasse le duel de deux puissances régionales. Cela parle d’un ordre international de plus en plus cynique, où l’impunité s’achète à coups de missiles et où la terreur devient doctrine d’État.

Des objectifs flous, une stratégie erratique

Malgré le vacarme médiatique de Benjamin Netanyahou, malgré les rodomontades et la vuvuzela d’un Donald Trump nostalgique de sa toute-puissance, Israël se retrouve aujourd’hui dans une impasse stratégique après son attaque contre l’Iran. Ce qui devait être un coup de semonce s’est heurté à une riposte ferme de la part de Téhéran — une séquence qui, de part et d’autre, laisse dans son sillage des morts, des blessés, des vies brisées. Résultat : une sidération.

Les discours israéliens se succèdent sans cohérence : empêcher l’Iran d’obtenir l’arme nucléaire ? Renverser le « régime islamique » ? Assassiner l’Ayatollah Khamenei, un vieil homme de 86 ans ? Chaque jour, semble accoucher d’un nouvel objectif, preuve s’il en fallait que la boussole géopolitique de Tel-Aviv se soit déréglée. À part semer le chaos, Israël ne parvient plus à formuler une ligne directrice stable.

Le ciel n’est pas une victoire quand la terre vous échappe

Aucun objectif militaire tangible n’a été atteint. Israël revendique la maîtrise du ciel, mais que vaut cette supériorité si elle ne parvient ni à désorganiser le commandement iranien ni à entamer sa capacité de riposte ? Dominer l’espace aérien ne suffit pas quand l’adversaire contrôle le temps politique. L’Iran a répondu. Et cette réponse révèle une vérité gênante : la force ne produit plus d’avantages stratégiques durables.

Face à cela, Israël fait ce que tout État acculé finit par faire : du terrorisme d’État. L’élimination de généraux, d’ingénieurs nucléaires, ou de hauts responsables iraniens, n’est ni plus ni moins qu’une stratégie de terreur. Déguisée en « frappes chirurgicales », elle relève du meurtre ciblé, de l’attentat, de l’attaque asymétrique. Ce ne sont pas là des gestes de souveraineté, mais des aveux de panique stratégique.

Ce que le monde doit dire : ce n’est pas de la défense, c’est de la brutalité

C’est pourquoi nous, peuples du monde, ne devons pas céder à l’habitude du silence. Car ce que l’on présente comme des interventions défensives n’est souvent qu’une brutalité stratégique sans horizon. On a déjà entendu ces discours. En 2003, c’était l’Irak : les armes de destruction massive ont servi de prétexte à une guerre illégale. On sait ce qu’il en est advenu : un pays anéanti, des millions de morts et un chaos durable. En Libye, la promesse de protéger les civils s’est traduite par la liquidation de l’État, le retour de l’esclavage et la fragmentation du territoire. En Côte d’Ivoire, sous couvert d’imposer les résultats des urnes, on a imposé une guerre de succession, brisé des vies, creusé des fractures qui saignent encore.

Aujourd’hui encore, le même scénario se rejoue avec l’Iran — et le même menteur mène la charge : Benyamin Netanyahou. Déjà en 2003, il réclamait la guerre contre l’Irak au nom d’un mensonge. Il recycle aujourd’hui la même peur, sans preuve, dans une région plus instable que jamais.

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Auteur : Félix Atchadé

Je suis médecin, spécialiste de Santé Publique et d’Éthique Médicale. Je travaille sur les questions d’équité et de justice sociale dans les systèmes de santé. Militant politique, je participe à l'oeuvre de refondation de la gauche sénégalaise.

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