Fuir ses comptes, chercher ses maîtres

Il est des spectacles navrants que même les dramaturges n’auraient osé imaginer. Macky Sall, ancien président du Sénégal, offre aujourd’hui celui d’un homme qui, acculé par les révélations accablantes de la Cour des comptes, préfère chercher la protection de la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, plutôt que d’assumer ses responsabilités devant son peuple.

Selon le journalLe Quotidien du samedi 26 avril 2025, l’ancien président n’a pas hésité à envoyer une délégation de fidèles à Washington, lors des Réunions de Printemps du FMI et de la Banque mondiale, pour tenter de défendre son bilan budgétaire devant les bailleurs internationaux. Une manœuvre d’autant plus pathétique qu’elle vise à contourner les accusations formelles émises par les propres institutions de contrôle du Sénégal.

Que l’on soit clair : ce n’est pas un quelconque politicien qui l’accuse. C’est la Cour des comptes du Sénégal, instance républicaine et indépendante, qui documente, preuves à l’appui, les falsifications budgétaires, les maquillages comptables et la dette abyssale léguée au peuple. Le déficit réel ? 12,3 % en 2023, et non les 4,9 % fièrement proclamés. La dette publique ? 99,67 % du PIB, soit une quasi-faillite organisée sous ses ordres.

Le réflexe colonial d’un ancien président

Plutôt que de répondre à ces accusations graves devant ses compatriotes, il a préféré dépêcher une équipe de fidèles à Washington, lors des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale, pour présenter un contre-rapport à la directrice du Fonds. Une démarche aussi désespérée que pitoyable : comme si l’on pouvait effacer les turpitudes budgétaires par quelques sourires diplomatiques et un jeu d’influences dans les chancelleries étrangères.

Il court au FMI, espérant un tampon d’innocence étrangère. Mais, comme le chantait Fela Kuti dans Colonial Mentality, They think foreign is better than home. They think black man is inferior. They no know themselves. They dem colonize in their head ». Macky Sall n’aime visiblement ni les audits sénégalais ni la vérité sénégalaise.

La question se pose désormais : après avoir tenté de se faire absoudre par le FMI, la prochaine étape sera-t-elle de se réfugier dans les bras d’Emmanuel Macron ? Après tout, pour certains, Paris reste l’ultime recours, l’asile mental de la défaite politique.

Mais que Macky Sall le comprenne bien : le Sénégal de 2025 n’est plus une colonie. C’est un peuple mûr, fier, décidé à exiger des comptes sur son propre sol. La Cour des comptes a parlé. Qu’il se cache sous les jupes du FMI ou derrière les rideaux de l’Élysée, il n’échappera pas à la sentence la plus implacable : celle d’un peuple qui a vu, su et jugé.