Trois mois après la victoire du Président Bassirou Diomaye Faye, la scène politique sénégalaise est secouée par des polémiques, certaines chimériques, d’autres fondamentales. Un échange épistolaire entre Guy Marius Sagna et Ousmane Sonko a révélé des tensions sur la légalité des procédures parlementaires. Face aux manœuvres politiques des députés BBY, le Premier ministre Ousmane Sonko et les députés Yewwi Askan Wi représentent un espoir de renouveau démocratique.

Trois mois après la cuisante défaite d’Amadou Ba à la présidentielle du 24 mars 2024, la scène politico-médiatique sénégalaise est de nouveau secouée par des polémiques. Certaines sont des chimères, d’autres de passionnés débats de fonds. Trois semaines après l’échec de la fronde néo-poujadiste contre l’impôt de la « bande de patrons de presse » à Mandiambal Diagne le sujet revient au-devant de l’actualité. Une poignée de députés sous l’égide d’Amadou Mame Diop, le Président de l’Assemblée nationale, et d’Abdou Mbow le président du groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar (BBY), tente la polémique — écran de fumée. En dépit de leur revers électoral, ces figures politiques s’accrochent au pouvoir qui leur reste avec une ardeur réactionnaire pour ne pas rendre des comptes sur leur gestion catastrophique. C’est le sens du remue-ménage parlementaire qu’ils ont amorcé.
Débat sur la gouvernance et la légalité des procédures parlementaires : échange entre Guy Marius Sagna et Ousmane Sonko
Un échange épistolaire entre le député du département de Ziguinchor, Guy Marius Sagna, et le Premier ministre Ousmane Sonko a été le prétexte pour que le président de l’Assemblée nationale et le président du groupe parlementaire BBY annulent le débat d’orientation budgétaire prévu le 29 juin 2024. Cette mesure a révélé des tensions sous-jacentes et a mis en lumière des questions essentielles concernant la gouvernance et la légalité des procédures parlementaires actuelles.
En milieu de la semaine dernière, dans une lettre adressée au Premier ministre, le député Guy Marius Sagna a dénoncé la falsification du Règlement intérieur de l’Assemblée nationale. Il a souligné que depuis la suppression du poste de Premier ministre en 2019, suivie de sa restauration en 2021, le Règlement intérieur n’a pas été mis à jour, créant ainsi une situation d’illégalité. Celle qui rend les procédures parlementaires ambiguës et sujettes à caution.
Guy Marius Sagna a donc demandé au Premier ministre Ousmane Sonko de ne pas faire sa Déclaration de politique générale tant que cette situation n’est pas réglée. Il a insisté sur l’importance de respecter les normes légales et de garantir que les institutions fonctionnent dans le cadre des lois établies. Cette demande vise à rétablir la transparence et la légitimité au sein de l’Assemblée nationale.
Dans sa réponse, publiée sur sa page Facebook personnelle, Ousmane Sonko a exprimé son impatience à présenter les politiques publiques du Gouvernement, conformément aux orientations du Président Bassirou Diomaye Faye. Il a reconnu les préoccupations soulevées par Guy Marius Sagna, mais a également insisté sur l’urgence de communiquer les politiques gouvernementales aux citoyens et aux parlementaires.
Ousmane Sonko a souligné que bien que l’article 55 de la Constitution exige la Déclaration de politique générale (DPG) devant l’Assemblée nationale, le règlement intérieur actuel de celle-ci n’est pas adapté à la réintroduction du poste de Premier ministre, supprimé en 2019 puis rétabli en 2021. Cette inadéquation du règlement intérieur complique la mise en œuvre des obligations constitutionnelles et perturbe le processus législatif.
En l’absence d’amendement du règlement intérieur de l’Assemblée avant le 15 juillet 2024, le Premier ministre réserve le droit de faire sa Déclaration de politique générale devant un public diversifié composé de citoyens et d’experts. Cette éventualité vise à contourner les obstacles institutionnels actuels et à garantir que les informations cruciales sur les politiques publiques soient communiquées de manière transparente et inclusive.
Un Règlement intérieur à revisiter
Guy Marius Sagna et les députés du groupe Yewwi Askan wi (YAW) ont bien raison d’insister sur la mise à jour du Règlement intérieur. Ils ne sont pas les seuls à avoir une telle exigence. Le vice-président Mamadou Lamine Diallo du groupe parlementaire Wallu le réclame depuis bientôt deux ans. Il menace d’ailleurs de porter cette affaire en justice si le règlement intérieur de l’Assemblée n’est pas corrigé d’ici le 14 juillet 2024.
Le règlement intérieur de l’Assemblée nationale est une pierre angulaire du fonctionnement démocratique de cette institution. Il est censé garantir l’ordre, la discipline, et le respect des procédures au sein de l’hémicycle. Cependant, les récents événements mettent en lumière des dysfonctionnements et des abus qui soulèvent des questions cruciales sur son application et son respect. L’exclusion de Aminata Mimi Touré de l’Assemblée nationale en est un exemple. Les conditions dans lesquelles cela a été orchestré sont honteuses et antidémocratiques. Les principes de transparence et de justice ont été bafoués. De même, la manière cavalière dont les députés Massata Samb et Mamadou Niang du Parti de l’unité et du Rassemblement (PUR) ont été livrés à la justice pénale et jugés par le tribunal des flagrants délits à la suite d’une rixe qui les a opposés à des députés de BBY au sein de l’hémicycle pose question. La décision prise de manière unilatérale et sans consultation préalable par le président de l’Assemblée nationale a montré à souhait la nécessité d’un Règlement intérieur qui garantit la transparence des procédures disciplinaires, la protection contre l’arbitraire, le respect des droits des députés y compris leur immunité et les mécanismes de recours.
BBY : chronique d’une ironie politique et de divisions internes
L’attitude des députés de BBY est un modèle d’ironie savoureuse. En février, ils se pavanaient en votant pour repousser la présidentielle à décembre 2024, comme s’ils avaient tout leur temps. Et voilà qu’ils trépignent maintenant d’impatience pour entendre le Premier ministre Ousmane Sonko. Sans doute un urgent besoin de sa sagesse ! Pourtant, si leurs machinations avaient réussi, Ousmane Sonko serait encore tranquillement installé à la prison du Cap Manuel, loin de toute Déclaration de politique générale. Ah, l’amour vache de nos chers députés de BBY !
Les présidents de l’Assemblée nationale et du groupe parlementaire BBY se méprennent grandement sur leur représentativité et leur capacité de nuisance. Le premier nommé, malgré son apparence de gendre idéal, est en réalité un faucon. Dans la vie, on distingue les pyromanes, les pompiers et les pompiers pyromanes. Il est à lui seul une catégorie à part : c’est un pyromane pyromane. Il allume le feu, l’attise et y verse de l’huile. Le second promet une motion de censure sans dire l’objet de celle-ci. Se prenant pour Éole, il promet le pire. Pour être généreux avec lui, il pourrait au mieux réussir à soulever une tempête dans un verre d’eau.
Le groupe parlementaire BBY n’est pas majoritaire au parlement. C’est un fait indéniable qui résulte des élections législatives du 31 juillet 2022. De plus, il est divisé entre les parlementaires qui vont prendre leur destin en main (députés du PS, de la LD, etc.) et ceux de l’APR. Ces derniers sont également divisés entre les partisans de Macky Sall, les adeptes d’Amadou BA, ceux qui ne savent pas où donner de la tête et enfin le groupe des députés qui ira là où le vent les portera.
Face à l’adversité, le Premier ministre Ousmane Sonko et les députés Yewwi Askan Wi incarnent l’espoir d’un renouveau démocratique et transparent. Leur insistance sur la légalité et la mise à jour du règlement intérieur est une bouffée d’air frais dans une Assemblée embourbée par les manœuvres politiques stériles des députés BBY. Ces derniers, autrefois arrogants, se retrouvent aujourd’hui à se débattre dans leurs propres contradictions et machinations. Comme l’a souligné Ousmane Sonko, « Il est urgent de communiquer les politiques gouvernementales aux citoyens et aux parlementaires, malgré les obstacles institutionnels. » La sagesse et la détermination de Sonko et des députés YAW contrastent ironiquement avec les gesticulations désespérées d’un BBY en perte de repères.
